Absence de rupture brutale des relations commerciales établies en cas de modifications non-substantielles de la relation commerciale, apportées durant l’exécution du délai de préavis

Absence de rupture brutale des relations commerciales établies en cas de modifications non-substantielles de la relation commerciale, apportées durant lexécution du délai de préavis

Cass. com. 7 décembre 2022, n° de pourvoi 19-22.538, publié au bulletin

 

Ce quil faut retenir :

Lorsque les conditions de la relation commerciale établie entre les parties font l'objet d'une négociation annuelle, ne constituent pas une rupture brutale de cette relation les modifications apportées durant l'exécution du préavis qui ne sont pas substantielles au point de porter atteinte à l'effectivité de ce dernier.

 

Pour approfondir :

 

En l’espèce, un distributeur de produits électroniques grand public a distribué, à compter des années 2000, les produits d’un fournisseur. Les conditions commerciales de leur partenariat étaient annuellement renégociées.

 

Les relations entre les deux sociétés se sont ensuite détériorées.

 

Par lettre du 20 mars 2012, le fournisseur a notifié au distributeur la rupture de la relation commerciale avec effet au 30 juin 2013.

 

Soutenant que le fournisseur avait rompu de manière abusive et infondée leurs relations contractuelles et sans respecter le préavis accordé, le distributeur l'a assigné en réparation de son préjudice.

 

La Cour d’appel de Paris dans un arrêt rendu le 5 juin 2019 (RG n°17/11700) a rejeté les demandes du distributeur au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie aux motifs que :

 

  • - après avoir relevé que le fournisseur négociait annuellement ses conditions commerciales, elle a énoncé qu’il était normal que celles-ci puissent évoluer, dans la mesure où un accord annuel n'est, par principe, pas immuable, l'existence de négociations annuelles permettant une évolution des conditions commerciales, y compris pendant l'exécution du délai de préavis,

 

  • - que les parties ont négocié, en 2011 et 2012, les conditions particulières les liant, de sorte que le distributeur ne pouvait prétendre à l'application illimitée dans le temps de conditions commerciales favorables accordées pour une année et nécessairement remises en cause par le principe de la négociation annuelle entre les parties.

 

Ainsi, la Cour a considéré que le distributeur ne démontrait ni que les engagements dont il faisait état, qui n'auraient pas été exécutés durant le préavis, étaient la pratique entre les parties avant la rupture, ni que le fournisseur s'était engagé à lui garantir ces conditions particulières.

 

Selon la Cour, le changement de mode d’approvisionnement aux mêmes conditions tarifaires ne caractérisait donc pas une modification substantielle de la relation commerciale interdite durant le préavis.

 

C’est dans ce contexte que le distributeur a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris (CA Paris, 5 juin 2019, n°17/11700).

 

Par son arrêt du 7 décembre 2022, la Cour de cassation a confirmé l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation formée par le distributeur au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie sans respect du préavis.

 

La Haute juridiction a estimé que la Cour d’appel avait valablement considéré que :

 

  • - le changement de mode d’approvisionnement aux mêmes conditions tarifaires ne caractérisait pas une modification substantielle de la relation commerciale interdite durant le préavis,

 

  • - la preuve d'un changement, en cours de préavis, des autres conditions commerciales existant, le cas échéant, entre les parties avant la rupture, n'avait pas été rapportée.

 

Il résulte donc de l’arrêt commenté qu’il n’existe pas un droit acquis au maintien de la relation aux conditions qui étaient celles en vigueur antérieurement à la date de notification de rupture des relations. Une limite est cependant clairement identifiable : les modifications des conditions commerciales ne doivent pas être substantielles.

 

Cette décision a été rendue dans la lignée de la jurisprudence antérieure à ce sujet (Cass. com. 7 septembre 2022, n° 21-12.704, Cass. com., 24 juin 2020, n°18-25.517).

 

 

A rapprocher :

 

Un article rédigé par Claire Saadoun du département Concurrence, Distribution, Consommation